Les Communautés ecclésiales de base

Les Communautés Ecclésiales de Base toujours vivantes !
Partageons avec le père François Glory, en mission dans le Nordeste brésilien, la richesse de l’Église du Brésil…

Les Communautés Ecclésiales de Base

Le conseil paroissial a proposé que toutes les communautés se donnent les moyens de devenir des Communautés Ecclésiales de Base (CEBs). Ce qui exige, d’une part, une plus grande participation de tous et, d’autre part, un sérieux investissement dans la formation des animateurs. Nous passons du modèle « curé tout puissant » qui peut lier ou délier à son – bon ou mauvais – gré, à celui de modérateur dont la charge est d’harmoniser les différences afin que les responsabilités soient partagées à tous les niveaux.

Les CEBs permettent aux pauvres de s’organiser en Église et d’être moins dépendants d’un imaginaire sacré, fruit d’une religiosité populaire liée à leur monde culturel. Au Brésil, Dieu sert à expliquer l’inexplicable, le bon comme le mauvais. Pour nous, en France, cela a peu de sens car nous vivons, contrairement à ici, dans un monde sécularisé.

Pauvreté et violence

CEBAu plan social, la pauvreté endémique perdure sur le terrain de structures injustes qu’alimente une corruption généralisée. Quand un groupe de personnes résiste à cet état de fait – et cela peut commencer au sein d’une paroisse, – j’entrevois un début de changement politique. Les statistiques, pour l’État du Maranhão, l’un des plus pauvres du Brésil, indiquent que plus de la moitié de la population dépend en partie des allocations gouvernementales pour sa survie. Cette situation scandaleuse est le résultat de décennies de despotisme de la part des oligarchies. Le gouvernement du président Lula a beaucoup fait pour supprimer la misère. Mais en s’alliant avec les partis les plus conservateurs pour assurer son pouvoir, il a anesthésié la force transformatrice des organisations populaires. Il est devenu celui qui met fin à la misère et résout les conflits en faisant miroiter une croissance tous azimuts.

Le Brésil est malade de sa violence : l’insécurité est permanente, les références morales s’estompent au gré des novelas (feuilletons) qui prônent la libre circulation de l’immoralité pour augmenter l’audimat. À ce triste tableau, j’ajouterai cette donnée : 50 % des enfants qui naissent ne sont pas désirés. Est-ce pour cela que la fête des mères devient un vrai culte ici, une manière de conjurer le sort et de déifier ce qui semble inaccessible à beaucoup ? La semaine dernière, après une célébration, j’ai rencontré João Paulo, petit noir de huit ans. Sa mère l’a abandonné dans le bus quand il avait deux ans. Il a été recueilli par une brave femme, déjà âgée, qui a eu pitié de lui et l’a pris avec elle. Combien de jeunes que je rencontre ont une expérience douloureuse de la famille : violence, absence de père, éloignement…

Signes d’espérance

Mais il y a aussi des signes d’espérance. Les premiers viennent de notre propre Église qui, malgré la tempête, ne sombre pas. Trois semaines après notre engagement en faveur des CEBs, nous recevions les déclarations de la dernière assemblée des évêques du Brésil (CNBB) comme un encouragement à continuer dans la voie choisie. Quelle ne fut pas notre joie quand nous avons découvert le document sur les CEBs ! Deux ans après la Conférence du Conseil épiscopal latino-américain (Celam) à Aparecida, les évêques brésiliens lui redonnent ses accents prophétiques. Un petit extrait de la conclusion dit en substance : Nous exhortons les paroisses à se transformer en « réseau de communautés »… Ainsi la paroisse sera plus vivante avec toutes ses communautés coordonnées par les laïcs, les diacres permanents, animées par les religieuses ou religieux, et ces communautés trouveront dans le Conseil Paroissial, présidé par leur curé, leur principal articulateur pastoral.

Voilà une directive qui indique clairement un des rôles du prêtre. Il est avant tout celui qui anime un réseau de communautés et leur donne les moyens de s’autogérer. Les communautés sont invitées à devenir missionnaires, selon l’esprit défini à Aparecida. Le repli sur soi est comme l’austérité en temps de crise, il ne peut qu’engendrer des réflexes de désespoir. Sortir de la crise, c’est comme en Pentecôte, vaincre la peur, ouvrir les portes et témoigner de l’espérance qui est en nous.

Je résume en une phrase lapidaire, au risque d’être mal interprété, ce que le va-et-vient entre la lecture biblique et ma plongée dans cette portion d’humanité où je vis, me fait constater : la misère est bien l’invention de l’homme. Mais la source de l’espérance ne pourra tarir tant qu’il existera, dans ces situations extrêmes, des hommes et des femmes qui œuvrent pour qu’adviennent, sans trop tarder, des temps nouveaux de plus grande justice sociale.

 

François Glory, MEP
São Luis du Maranhão. BRÉSIL
Dimanche de Pentecôte, 23 mai 2010

La prière dans les Communautés Ecclésiales de Base en Amérique latine

Les chrétiens d’Amérique latine réunis dans les communautés ecclésiales de base, prient et s’engagent pour qu’advienne le Royaume de Dieu annoncé par Jésus dans l’Évangile, Royaume de justice et de fraternité.

Pierre Riouffrait avec une CEB en Equateur

Pierre Riouffrait avec une CEB en Equateur

Avant d’entrer dans les Communautés Écclésiales de Base

Je pense que nous, les pauvres, avons la certitude de l’existence de Dieu. C’est un héritage qui nous est transmis grâce à la dévotion aux saints et à Jésus-Christ. Souvent, notre prière est une prière de supplication. Nous ne doutons pas que nous allons être écoutés et aidés.

Notre prière a également une dimension collective et festive. Et cela, nous, le peuple des pauvres, le savons, au moins inconsciemment. Notre force, c’est notre religiosité populaire.

Avec notre entrée dans les Communautés Ecclésiales de Base (CEBs)

– Dans les CEBs, nous faisons la rencontre d’un Christ libérateur, présent dans toute la vie. Nous devenons acteurs au service du Royaume. Cette découverte transforme notre prière et confirme sa dimension collective. La prière de supplication devient prière d’espérance et d’engagement pour changer en nous et autour de nous ce qui n’est pas conforme aux valeurs du Royaume. Comme femmes, nous découvrons notre dignité.

– Nous découvrons le visage de Dieu dans les pauvres. Ce sont eux le visage actuel de Dieu. Nous revivons dans nos luttes personnelles et collectives pour rendre plus présent le Royaume. Dans la prière, nous rendons grâce à ce Dieu libérateur avec nous. Notre prière se fait action, et action féconde : Elle engendre une vie nouvelle.

– La prière nous ouvre aux autres. Ce n’est plus seulement une prière individuelle ou familiale; maintenant notre prière est communautaire. Nous ne nous contentons pas de répéter des formules ni de répéter des gestes. Nous y mettons un contenu de vie et de libération. La vie devient prière et la prière se fait engagement.

– Avec les CEBs, notre prière a trouvé un sens d’intimité communautaire. Il ne s’agit plus seulement d’une communion individuelle avec Dieu. Nous avons découvert une dimension collective. C’est ensemble que nous vivons l’intimité, la communion profonde avec lui. C’est l’expérience d’une joie nouvelle: ensemble oui, mais surtout ensemble avec lui, dans un même amour au service de la vie, de plus de vie pour soi et pour tous. Nous devenons le temple de Dieu où se vit cette intimité personnelle et collective, une intimité partagée et célébrée.

– Notre dévotion et nos prières à Marie se remplissent de tendresse au milieu de tant de problèmes et de sacrifices. Grâce à Marie, nous découvrons notre grandeur de femmes. Nous ne sommes plus des personnes de seconde catégorie ; avec elle, nous devenons protagonistes de la libération. Grâce à notre dévotion mariale, nous devenons plus dignes, plus fortes, plus solidaires.

– La prière fortifie notre engagement pour le Royaume et son projet libérateur. Le royaume est le centre de notre spiritualité.

– Les CEBs nous font prendre conscience que nous sommes un peuple sacerdotal. La prière et la religiosité populaire sont la matière de notre sacerdoce. Nous nous offrons personnellement, nous offrons notre famille, notre petite communauté, notre quartier, nos luttes, nos engagements politiques comme « une offrande agréable à Dieu » (Romains 12, 1). C’est notre « culte spirituel » comme dit Saint Paul. Et Jésus-Christ nous transforme en sa présence, nous sommes l’Esprit et la vie de son royaume aujourd’hui.

Les moments de prière d’une CEB

Au cours de la réunion
– Les réunions commencent toujours par une brève prière faite par l’animateur ou par quelqu’un du groupe. C’est généralement une invocation au Saint-Esprit pour que les participants profitent au maximum de tout ce qui va se dire.
– A la fin de la réunion, il y a une prière communautaire. L’animateur invite une personne à introduire la prière ou bien la majorité des participants va intervenir par une prière spontanée à partir de ce qui s’est dit au cours de la réunion. La même personne termine par une conclusion et fait prier entre tous le Notre Père, la salutation à Marie et la bénédiction.

Hors des réunions
– Les familles du quartier où existe une CEB demandent aux membres de la CEB de venir les accompagner pour animer une neuvaine. Cette pratique est assez courante pour Noël, le mois de mai dédié à Marie, la dévotion à un saint, la fête de la paroisse, après le décès d’une personne…
– Pour l’Eucharistie dominicale, la participation des membres des CEBs est toujours active. Leur prière part toujours de la réalité du quartier, du pays ou du moment.
La prière des CEBs se dirige généralement à Jésus vivant, proche, ressuscité. Elle a le souci du Royaume aujourd’hui. Leur prière est celle des gens simples avec un contenu biblique en lien avec la réalité.

 

Pierre Riouffrait
prêtre Fidei Donum du diocèse du Puy, en Équateur (Amérique du Sud) depuis 1976
document de septembre 2005

 

 

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